La 1ère
partie de cet article a montré que l’embellie de croissance supposée et les
propos du gouvernement vantant une reprise justifiée par sa politique
économique étaient sans impact sur le chômage global. Les 40 milliards investis
dans une politique de ruissellement devaient créer un million d’emplois. Le
Medef l’affirmait et portait même ce slogan sur le revers de la veste. Malheureusement
non seulement le chômage global n’a pas diminué d’octobre 2016 à juillet 2019 comme
en attestent l’évolution de l’ensemble des catégories répartissant les
demandeurs d’emploi et celle du taux d’activité ou d’emploi, mais le nombre des
demandeurs de la catégorie A de la perte d’emploi à temps plein, catégorie
médiatisée, n’a fondu que de 67 000 demandeurs pendant ces 34 mois. Ces
chiffres ne vous donnent probablement pas une représentation exacte de leur
importance. Cela veut dire un coût de 600 000 euros par emploi gagné ou
encore 41 ans de salaire net au SMIC (1204 €/mois)
par emploi ! Cela vous montre la dérision de l’opération CICE promue
par le slogan d’un million d’emplois pour la faire passer dans l’opinion
publique. Mais ce chiffre de 41 ans, soit la totalité d’une carrière d’un
salarié, ne vous fait-il penser à rien dans cette période d’allongement du
temps de travail pour payer les retraites futures ? Si la décroissance du
chômage est une arnaque, on peut toutefois espérer voir dans cette politique du
ruissellement un impact positif sur la croissance et peut-être sur notre niveau
de vie puisque la croissance à 0,31% du 2ème trimestre valide la
prévision budgétaire de 1,2% sur l’année.
2 - La
France mène-t-elle une bonne politique de croissance ?
Pour répondre à cette
question il est indispensable de comparer la France aux autres pays européens,
sachant que globalement l’Espace économique Européen est en retard par rapport
aux autres grandes entités économiques. Par rapport aux informations sur la
croissance du 2ème trimestre connues au 31 août la croissance de la
France dépasse celle de l’UE et de la Zone euro. Celle de la Zone euro est
plombée par la stagnation de la croissance italienne qui sort juste de la
récession et par l’effondrement de celle de l’Allemagne qui met un pied dans la
récession. Notre croissance du 2ème trimestre 2019 ne nous place
pourtant qu’en 13ème position parmi les 20 entités de croissance
représentées. En outre notre croissance sur une année glissante à 1,38% reste
modeste avec une 14ème place et largement derrière l’Espagne à
2,25%. Le Royaume-Uni affiche une croissance négative de -0,19% au 2ème
trimestre 2019 en raison de la baisse de 6% de la Livre mais sa croissance
annuelle reste néanmoins proche de celle de la France. Les champions de la
croissance se trouvent à l’Est et au Nord de l’UE attestant du transfert de
richesse du Sud vers ces pays où la Hongrie surfe sur une croissance annuelle
de 5,21%. Le résultat de la politique économique française avec ses 40
milliards du CICE et ses 10 milliards pour les Gilets Jaunes a peut-être permis
à la France de retarder l’impact de la décroissance mondiale par rapport à
l’Allemagne en compensant le handicap de l’euro pour nos exportations, mais
elle reste modeste et très liée à la conjoncture internationale.
Le jugement sur la
croissance ne peut s’abstraire de la démographie. Un pays dont le nombre
d’habitants augmente est potentiellement à même de faire progresser le PIB par
un afflux de main-d’œuvre. L’Allemagne a d’ailleurs réagit sur une démographie
décroissante en la compensant par un important flux migratoire. Il est donc
indispensable de comparer les pays sur l’indicateur PIB/habitant, indicateur
qui représente la richesse accumulée par habitant, richesse qui est globale et
n’est pas forcément liée à l’augmentation du pouvoir d’achat. Sur les 13
valeurs affichées pour la variation du PIB/habitant au 2ème
trimestre 2019 la France n’apparaît qu’au 8ème rang des meilleures
variations. Ce n’est pas un exploit même si le chiffre est meilleur que celui
de l’UE et surtout de celui de la Zone euro pour les mêmes raisons qu’exposées
pour le PIB. L’Espagne confirme sa bonne performance d’augmentation de richesse
mais les grands gagnants sont toujours les pays de l’Est et du Nord. Si
l’Allemagne est réellement en perte de vitesse, l’Italie se tire tant bien mal
d’une période de stagnation. Il y a indéniablement un léger accroissement de
richesse française à hauteur de 1,17% annuel du PIB/habitant pour un
accroissement de 1,38% du PIB. Il reste à savoir ce qui a réellement nourri cet
accroissement et ce qu’en ont retiré les ménages.
Le commerce extérieur
est un des facteurs économiques qui agissent directement sur le PIB. Il est
donc intéressant de regarder son influence sur la croissance du 2ème
trimestre 2019. Le sens de son évolution et le jeu des importations et
exportations donnent un premier éclairage sur l’apparente embellie de
croissance. C’est le solde du commerce extérieur qui rentre dans le calcul du
PIB. On voit que la variation de ce solde par rapport au PIB est négatif sur
l’ensemble des 19 pays représentés. Toutefois 4 pays améliorent ce solde :
Royaume-Uni, Danemark, Espagne et Italie. Le cas du Royaume-Uni est intéressant
car son PIB est négatif sur ce 2ème trimestre et ce pays a toujours
un fort solde négatif qui en fait un pays globalement importateur. Ce point est
à signaler au moment où le Brexit est probable.
La
France a donc augmenté son déficit commercial de 0,33% soit 3, 345 milliards
d’euros en volume au cours du 2ème trimestre 2019, ce qui veut dire
qu’à solde nul sa croissance trimestrielle du PIB aurait été de 0,64% (0,31% +
0,33%) et de 1,71% sur une année glissante (1,38%+ 0,33%). Au passage on note
que, le solde du commerce extérieur baissant le PIB, la stagnation du chômage ne
peut être financée que par la dette à
hauteur de 0,12% (1,5% - 1,38%) pour atteindre les 1,5% donnés comme la valeur
au-delà de laquelle on a une réelle décroissance du chômage. La dette a
augmenté de 0,52% par trimestre sur une année glissante allant de juin 2018 à
juin 2019, il reste donc 0,4% (0,52% - 0,12%) de l’accroissement du déficit provenant
des dépenses des administrations publiques. Avec un déficit annuel
approchant les 63 milliards la France vit bien au-dessus de ses moyens quand
l’Allemagne commence à rembourser sa dette. Avec une dette de 34250
euros/habitant la France est le 4ème pays le plus endetté de l’UE
après l’Irlande, la Belgique, l’Italie mais devant la Grèce, même si la
dette/PIB de cette dernière est beaucoup plus importante que celle de la
France !
Il est important de
connaître la balance entre les exportations et les importations pour juger d’où
provient le solde négatif commercial de la France. Les exportations/PIB sont en
baisse de -0,64% soit une baisse plus importante
que celle du solde à -0,33%. Ce qui signifie que les importations n’ont baissé que
de -0,31%. La France subit un ralentissement des échanges comme la plupart
des pays européens mais elle baisse deux fois moins ses importations que ses
exportations. Si l’on se compare à l’Italie, celle-ci a un solde/PIB
positif de +0,44% mais la variation positive de ses importations est 2,8 fois
moins importante que celle de ses exportations. L’Italie est donc revenue au 2ème
trimestre 2019 dans une spirale positive. L’Allemagne est au contraire dans une
spirale négative avec un solde négatif de -0,78% avec une hausse de ses
importations à +0,25% quatre fois inférieure à celle de la baisse à -1,03% de
ses exportations. Même si l’Allemagne conserve un solde très positif, son
importance va baisser de façon significative et redescendre vers les 50
milliards annuels. Le cas du Royaume-Uni est très différent. Son solde
commercial a varié très positivement à +0,99% malgré une baisse de -1,31% des
exportations. Son bon résultat est dû à une baisse de -2,3% des importations dû
probablement à la baisse de la Livre qui a influencé les consommateurs de
produits étrangers. En résumé la France est dans une spirale négative qui
s’est aggravée au 2ème trimestre 2019 pour son commerce extérieur ce
qui n’est pas un bon signe de santé économique.
Il nous reste à voir
un autre moteur de la croissance, la consommation des ménages. Pour en juger la
comparaison avec les autres pays s’impose.
Au 2ème trimestre 2019, la part de la croissance du PIB à +0,31% est
due pour les 2/3 à la croissance de la consommation de +0,20%. Toutefois elle
est en retrait par rapport à une année glissante avec 1,17% de croissance du
PIB où la croissance de la consommation en représente 85% avec +0,99% de
croissance de la consommation. C’est un signe d’affaiblissement de ce moteur de
l’économie qui va peser sur le déficit budgétaire s’il se poursuit. Mais la
France se signale par un faible accroissement annuel de la consommation par
rapport aux autres pays représentés ici et termine en 7ème et
dernière position. C’est un indicateur de l’application de la politique de
ruissellement qui ne booste pas la consommation mais booste l’appareil
productif. Ce n’est pas le cas de trois autres grands pays : Royaume-Uni,
Espagne et Allemagne.
Si la consommation
globale des ménages est un indicateur de politique économique, elle ne donne
pas d’information sur ce qui en résulte pour chaque habitant. La consommation
des ménages par habitant représentée dans ce graphique donne une image plus
nuancée de la position de la France dans l’enrichissement des consommateurs.
Elle se place en 5ème position sur une année glissante mais elle
affiche une croissance nulle de la consommation des ménages/habitant pour le
deuxième trimestre 2019. La croissance du PIB du 2ème trimestre
2019 est donc un leurre pour le consommateur français. Evidemment la
situation s’est inversée pour l’Espagne dont le consommateur voit sa
consommation diminuer au 2ème trimestre 2019, mauvais signe pour son
élan économique qui va de plus en plus être lié au solde commercial plus
aléatoire. Mais nous ne sommes pas seuls dans ce brusque ralentissement de la
croissance des ménages/habitant, le consommateur allemand vit la même chose au
2ème trimestre 2019, même si annuellement il bénéficie d’un
accroissement presque double de la France. On note une croissance soutenue pour
les consommateurs néerlandais et britanniques. Les médias qui pleurent sur le
sort du peuple britannique feraient bien de regarder les chiffres. Il est vrai
qu’ils n’en ont pas besoin pour raconter ce qui les arrange.
Il est temps de
conclure en jetant un regard rapide sur les engagements financiers de notre
pays qui impactent évidemment le PIB au premier chef. On nous dit que le
gouvernement fait des économies en s’appliquant la politique d’austérité. En
effet au 1er trimestre 2019 et d’une année glissante à la précédente
la France affiche une baisse moyenne du total de ses engagements de -0,42%.
C’est peu quand, selon les données Eurostat, l’UE affiche -2,72% et la Zone euro
-2,96%. Après Chypre, la Grèce, l’Estonie, la Norvège et la Finlande, la
France reste le pays qui fait le moins d’effort pour restreindre ses dépenses.
Le grand pays le plus performant est l’Allemagne avec -5,20%, ce qui ne
surprendra personne, mais le Royaume-Uni fait trois fois mieux que la France.
La France se classe de plus en plus dans les pays dépensiers. En outre la
progression de ses engagements de dépenses des administrations publiques de +0,42%
est près de trois fois plus rapide que la baisse de ses avoirs à -1,17% sur une
année glissante. Cette situation s’aggrave donc pour le déficit budgétaire,
et les signaux récents sur la consommation du 2ème trimestre 2019 ne
font qu’accentuer une vision économique préoccupante pour la France.
En
résumé la politique de ruissellement de la France ne profite ni au consommateur
ni à la baisse du chômage, et les administrations publiques ne baissent pas
leurs dépenses au rythme de l’entrée des avoirs malgré une politique de
taxation élevée pour le consommateur à base de hausse de l’imposition indirecte
sur le consommateur. La hausse des tarifs des services publics payants sur
l’énergie et les transports est supérieure à l’inflation. La France reste donc
un pays dépensier qui renâcle à mener une véritable politique d’assainissement
des administrations publiques, elle gonfle ses effectifs en baissant artificiellement
le nombre de fonctionnaires par un transfert de tâches plus important sur des
partenaires privés, et promeut une décentralisation plus coûteuse par la
multiplication des strates administratives. Cette réticence pour des raisons
électorales, sa perte de l’outil monétaire avec un euro trop cher pour son économie,
sa politique de ruissellement se traduisant par un transfert de l’argent du
peuple vers les actionnaires dans impact sur le chômage et le déficit du
commerce extérieur, font de la France un pays vivant au-dessus des moyens mis
en place, et creusant sa dette. La France est désormais l’un des quatre pays
les plus endettés d’Europe avec 35214 €/habitant et devance la
Grèce. Cette politique économique ne peut mener que vers un appauvrissement du
peuple et une baisse progressive des prestations sociales, une détérioration
des infrastructures, une baisse de la qualité des services publics, et une
raréfaction dans la couverture du territoire. Ajoutons à cela une politique
énergétique incohérente où l’idéologie prend le pas sur le pragmatisme en se calquant
sur une Allemagne encore riche qui a déjà investi au moins 200 milliards dans
les énergies renouvelables sans gain sur l’émission de CO2
pour la production d’électricité. Le chant du coq français, qui veut réveiller
le monde pour sauver la planète alors que notre contribution à l’émission globale
de CO2 est inférieure à 1%, sera de plus en plus celui d’un coq
déplumé qui finira dans la casserole du monde globalisé des grands possédants.
La
croissance et le chômage sont un leurre
Pour
le consommateur et le salarié.
La
politique de ruissellement
S’accumule
dans la poche
Des
grands actionnaires !
Claude
Trouvé
02/09/19
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